Jusqu’au 18ème siècle, les épices, symbole de richesse, de lointaines caravanes et de commerce maritime incitèrent les explorateurs et les grands marchands à parcourir le monde. Alexandre Le Grand s’approvisionnait en Afrique de cannelle, les conquistadors découvrirent le piment, Marco Polo ramena le gingembre de Chine et Pierre Poivre implanta la vanille en Polynésie. Aujourd’hui ces épices des quatre coins du monde nous offrent tous leurs bienfaits.
L’Afrique : La cannelle et l’anis
L’Afrique nous évoque des marchés colorés aux senteurs prenantes d’encens, de cannelle, d’anis, de pavot, de safran et de cumin.
La cannelle chaude et douce est connue depuis 2500 ans av JC en Chine. Les romains la mêlaient aux couronnes de laurier et elle participait aux embaumements dans l’Egypte ancienne. Plus précieuse que l’or, elle se démocratisa en Europe au XIIIème siècle. En Autriche on s’en offre en gage d’amour. D’après Discoride « Tout cannelle échauffe, remollit, fait digestion, provoque l’urine… » Dite aphrodisiaque, elle rend un organisme trop yin plus yang en le réchauffant. En huile de massage elle stimule notre énergie, la microcirculation de la peau et nous enveloppe de son arôme puissant. En hiver la cannelle s’harmonise bien à un zest d’orange dans un vin chaud, dans les gâteaux, les entremets et la glace. Pour améliorer votre circulation sanguine, ajoutez un peu de cannelle en bâtons ou en poudre dans vos tisanes ou votre thé, c’est délicieux. En pots pourris ou dans un humidificateur en huile essentielle, elle parfume les pièces, assainit l’atmosphère en prévenant la grippe.
L’anis est très présent dans les pâtisseries alsaciennes, dans le pastis, l’ouzo et l’arak du nord de l’Afrique. Son odeur rafraîchissante est appréciée dans les plats et dans les tisanes digestives. Infusé puis servi glacé, il désaltère en été. En sachet d’anis dans votre armoire votre linge embaumera et en pots pourris il neutralise les odeurs de tabac. Le safran provient du Moyen-orient, c’est une des épices les plus chères du monde mais quelques stigmates colorent et parfument une paëla, un rizotto, une bouillabaisse ou une crème brûlée. Les romains l’appréciaient pour son goût et son parfum : l’Empereur Héliogabale prenait des bains au safran en guise d’autobronzant. Dans la vallée du Nil poussait le cumin. Les romains le considéraient comme une plante très précieuse. Il est diurétique et agit contre les ballonnements, en assaisonnant ses légumes et sa salade avec du cumin entier et en consommant du pain au cumin. En Egypte et à Sumer le pavot ou papaver somniferum était appelé « plante de la joie » ou plante d’oubli. On en tire l’opium. Dit « graine de douceur », ses graines bleutées parfument aussi les pâtisseries en Europe centrale. C’est un puissant anti-douleur.
Les Amériques : Le piment
Qui dit Amériques, dit piment de Jamaïque, de Cayenne, Chili ou piment oiseau, paprika et baie de genièvre. Originaire d’Amérique du Sud et des Caraïbes, le Piment est consommé depuis plus de 9000 ans au Mexique dans les sauces, les tortillas et dans le chilli con carne. D’après des traces de cultures chez les précolombiens, le Chilli, était un élément important des Toltèques, Aztèques, Incas et Mayas. Découvert par Christophe Colomb en 1493, les espagnols l’appellent « pimiento » ou poivre. Il servait de monnaie et de plante médicale sacrée chez les Incas qui préparaient leur Tchalcaot, ou cacao, avec du piment. Depuis c’est l’épice la plus répandue dans le monde. Les basques français en ont fait une spécialité de chocolats au piment. Pour éteindre le feu du piment « enragé », rien ne vaut un produit laitier. Il soignerait la malaria, le typhus et la dysenterie dans les pays chauds. Cet aphrodisiaque décongestionne, expectore, échauffe, calme et diminue les risques cardiaques grâce à la capsaïnine. En hiver, les frileuses réchaufferont leur organisme en assaisonnant leurs plats d’un soupçon de chilli ou de colombo, mélange antillais de piment et de curcuma. Crû, il est apéritif et favorise la digestion des féculents. Le chilli est si puissant qu’on en fabrique des gaz lacrymogènes et le poison des flèches amazoniennes. Au Brésil le rituel candomblé le célèbre dans les macumbas vaudoues. Le paprika, lui, vient du piment doux, ou poivron vert avant qu’il ne prenne sa saveur brûlante. Il est beaucoup utilisé en cuisine Hongroise et est remarquable par sa teneur en vitamine C. Saupoudrez votre fromage blanc de paprika, il fera une sauce fine pour vos crudités et un air de fête pour vos pâtes. En Amérique du Nord, le genièvre entre dans la composition du gin, égaie les plats de gibier, la choucroute et parfume les potées. Macéré une semaine dans du vin blanc apéritif, il est anti-inflammatoire, calmant, diurétique et antirhumatismal. Enfin l’huile de genévrier dans le bain, à base d’huile essentielle nous délasse de nos courbatures.
L’Asie : Le gingembre
L’Asie ce sont des senteurs acides et piquantes comme le gingembre, la badiane de Chine, le poivre d’Inde, la cardamome ou le curcuma. Pas un menu chinois sans un plat au gingembre depuis l’empire chinois, 2500 ans av JC. Les arabes l’introduisent en Grèce et dans l’Empire romain et il se répand en Europe au Ier siècle. Dès le XIème siècle on l’apprécie en Afrique, Christophe Colomb découvre son origine puis les portugais le diffuse en Afrique occidentale. Cette épice longtemps luxueuse, fut la plus commune en Europe après le poivre. Cette racine est un tubercule charnu noueux, son rhizome peut devenir fibreux. La majeure partie est séchée et réduite en poudre. Réveillez un simple gâteau de Savoie, ou un cake au cacao avec du gingembre râppé. Les thaïs utilisent le gingembre ou le galanga dans leur cuisine. Souverain en Chine, il soigne tout. Confit et dans les confitures, il fait digérer, en cocktail, il redonne de la vitalité et en compotes, il réchauffe. Très tonique, quelques gouttes d’huile essentielle de gingembre diffusées dans l’atmosphère réveillent les lymphatiques.
La subtile cardamome, fut le monopole des Radjas sur la côte de Malabar puis elle migra vers l’Afrique, pour aromatiser le café et le ras el hanout. En Inde, reine des épices, on l’utilise comme condiment et pour ces propriétés médicinales. Un papyrus de 1500 ans av. JC ventait ses vertus et Cléopâtre en parfumait son palais. La cardamome arrivait dans l’empire romain par caravanes entières. Aujourd’hui quelques gousses de cardamome parfument délicatement un quelconque thé de Ceylan. La cardamome participe au célèbre mélange indien, le curry additionné de cayenne, de curcuma, de cumin, de graines de moutarde, de fénugrec, de poivre, de safran et de coriandre…Chaque indienne a sa recette. Il compose aussi le garam massala, un mélange d’épices plus doux.
Le poivre, originaire aussi de la côte de Malabar, a un parfum différent selon les régions de production, Malaisie, Indonésie, ou Brésil. Celui de Malabar est le plus réputé. Toute la planète en consomme, il forme 1/4 du commerce mondial des épices. Depuis Alexandre le Grand, il s’échangeait contre l’or et servait de devise commerciale. Cueilli vert, c’est le Poivre Vert, sec, c’est le Poivre Noir, mâture, il devient le Poivre Rouge. Séché et débarrassé de son enveloppe, il donne Poivre Blanc. En grains noirs dans des pêches ou des poires au vin, c’est exquis. Ses oligo-éléments sont intéressants pour la santé.
L’Océanie : La vanille
L’Océanie, ce sont des effluves de vanille, de galanga et de noix de coco de l’archipel de la Société et des Marquises. Ces senteurs se mélangent aux notes de noix de muscade et de clous de girofle de l’archipel aux Epices. La vanille vient d’Amérique tropicale. Introduite en Polynésie par l’amiral F. Hamelin en 1848, elle donna la Vanilla tahitensis aux Iles-sous-le-vent. Une seconde variété, la Vanilla flagrans pousse dans les îles australes. Aujourd’hui le parfum fleuri de la vanille polynésienne de Tahaa, Raiatea et Huahine est réputé. Le vanillier est une liane géante grimpante des tropiques. Les petits grains des gousses donnent l’extrait et l’essence de vanille pour la parfumerie et la cuisine. Parfum d’enfance entre tous, elle nous rappelle la saveur du lait maternel, dans la crème vanillée à la patate douce, la glace, et le lait vanillé. Osez la langouste ou une volaille avec une sauce vanillée et poivrée. Elle entre naturellement dans la composition de nombreux parfums et de soins corporels. Un peu plus haut dans l’océan indien, les clous de girofle sont en réalité des boutons floraux d’un arbre tropical, séchés en forme de clous. On les retrouve dans le pot au feu, les marinades et les potées vapeur. Le mélange chinois cinq parfums est composé de clous de girofle, de poivre de Szétchuan, de badiane, de fenouil et de cannelle. Les africaines, portent les clous de girofle en collier pour imprégner leur peau et leurs gestes de ce parfum sensuel. C’est un puissant antiseptique, analgésique et un anesthésiant très utilisé par les dentistes. Ce stimulant agit contre les troubles intestinaux et bactériens, il est antifongique. Le thé aux clous de girofle est bon contre les indigestions et est très désaltérant : 10 clous par tasse à infuser 3 minutes. Pour parfumer une pièce, on pique de clous de girofle une orange pendant 3 – 4 semaines. Toujours aux Moluques, la noix de muscade donne deux épices le macis et la noix qui parfument les gratins, les purées et les sauces blanches. Les arabes l’importaient d’Inde à Constantinople au VIème siècle puis en Europe jusqu’au nord au XIIème siècle. En 1605 les Hollandais s’emparent de son monopole. La muscade permet de lutter contre les gaz stomacaux. En poudre ou râpée, c’est un euphorisant en salade ou sur des légumes. Anti-dépresseur, à haute dose, elle est hallucinogène.
Vertus de la cannelle, du genièvre, du gingembre et de la vanille en aromacologie Par Yvonna Ostojic, phytothérapeute et aromathérapeute
Genièvre
Des baies on extrait l’huile essentielle aux deux grandes propriétés. Antirhumatismal et diurétique, il agit contre la goutte, l’arthrite et l’arthrose en favorisant l’élimination des toxines et de l’acide urique par la diurèse. Frictionnez les zones douloureuses avec une huile de massage maison: 50 gouttes d’huile essentielle de genièvre, 50 gouttes d’huile essentielle de bouleau, 50 gouttes d’huile essentielle de romarin et 50 gouttes d’huile essentielle de pin dans 30 ml d’huile de millepertuis. Massez les zones infiltrées et éliminez les petits cristaux d’acide urique et la rétention d’eau, avec 10 ml d’huile essentielle de citron, 10 ml d’huile essentielle de géranium et 10 ml d’huile essentielle de genièvre diluées dans de l’huile de noyau d’abricot. Diffusée dans l’air, l’huile essentielle de genièvre réchauffe, réconforte et cocoone.
Cannelle
De la famille du laurier, elle est un arbre de 5 à 15 m des régions chaudes et humides. Ses principes actifs stimulants et astringents, agissent contre les diarrhées et les maux d’estomac. Antiseptique puissant, antifongique, antibactérien, elle est utilisée en aromathérapie contre grippe et refroidissements. Antispasmodique, elle est dite aphrodisiaque. Une friction très sensuelle maison : 100 ml d’huile de germe de blé, 25 gouttes d’H. E. de romarin, de sarriette, de cannelle, de gingembre et de girofle.
Gingembre
Il est utilisé en tonique respiratoire, en analgésique sur les muscles et sur les articulations. Ses principes actifs le rendent anti inflammatoire et anti-arthritique, il chauffe les muscles et le métabolisme. Un peu de gingembre rappé le matin dans un jus de fruit aide à affronter une froide journée. En friandise il est antibactérien. C’est un stimulant fortifiant recommandé aux accouchées, il baisse le taux de cholestérol, améliore la vue et agit contre le mal de tête. On en fait des infusions contre la grippe. Un cocktail aphrodisiaque : une cuillère à soupe de sirop de fruits rouges, une goutte d’huile essentielle de gingembre, une goutte d’H. E. de géranium, une goutte d’H.E. de citron, avec de l’eau gazeuse. Contre l’asthénie, deux gouttes d’H.E. de gingembre dans une cuillère de miel avec une tisane. 5 gouttes d’H.E. de gingembre dans 20 ml d’huile d’amande douce en friction sur l’estomac soulage des crampes abdominales.
Vanille
Seule orchidée produisant des fruits. Le vanillier produit au bout de 4 ans. Pour en exhaler l’odeur il faut tout un processus de bain, étuvage et séchage. Des gousses broyées on obtient une poudre et l’extrait de vanille très cher. Sucre vanillé maison : 4 g de gousse pour 100g de sucre. Une gousse c’est 2% d’huile essentielle de vanille et 90% de vanilline, molécule est très odorante. Son odeur réconfortante, enveloppe et met en confiance, donne une sensation de cocon sécurisant. Guerlain est le premier parfumeur à l’avoir utilisé.